Dans le cadre d'une réorganisation du département Marketing du New York Times, Perrine Pavageau a pris le rôle de “Program Manager”, un rôle à la croisée de la vision stratégique et de l’exécution (lire notre article ici). Son principal objectif : mettre en place des mécanismes opérationnels pour assurer le succès des stratégies marketing. On peut identifier le Program Management à la fonction d’un PMO (Project Management Officer), vu plus fréquemment dans des Directions Produit ou Tech, qui apporte aux équipes les méthodes et outils qui leur permettront de réaliser leurs objectifs. Un PMO peut aussi gérer ses propres projets, dont les acteurs ont souvent des objectifs très différents les uns des autres. Une fonction qui répond aux questions “comment on fait ?”. Un interlocuteur vers lequel les équipes peuvent se tourner pour exprimer leurs challenges organisationnels. Dans cette série d’articles, Perrine raconte 5 projets concrets qu'elle a menés dans cette fonction pour le New York Times. Aujourd'hui, l'épisode 3 : la newsletter interne.
Ce projet peut paraître anodin, mais je pense qu’il a eu beaucoup d’impact. Il est aussi très révélateur du rôle de la fonction Program Management dans un département Marketing.
Dans mon article d’introduction sur le Program Management, j’ai mentionné plusieurs mots-clés, parmi lesquels celui-ci : VISIBILITÉ. Ce rôle très central permet d’apporter de la visibilité à des équipes qui peuvent parfois travailler en silo.
Au sein du service Marketing Operations du New York Times, un exemple très concret d’apport de visibilité aux équipes a été la création d’une newsletter interne hebdomadaire, envoyée à tous les acteurs du Marketing qu’ils soient décisionnaires ou opérationnels.
Son contenu : la liste des projets en cours, organisés par mission ou business unit, avec pour chacun :
- Leur niveau de priorité : High, Medium, Low
- Leur phase de développement : Kickoff, Concept & Planning, Build, Launch & Close (voir article Episode 1 : l’Interaction Model)
- Leur statut : Project Intake, In Progress, Complete, On Hold, Canceled
- Leur niveau de risque avec un code couleur, par exemple : Vert (On Track), Orange (Delayed), Rouge (At Risk)
- Un commentaire du chef de projet sur le statut et les next steps.
Pour moi, cette newsletter apportait une vraie valeur ajoutée en donnant à chacun une vision globale des projets, de leur avancement, de leurs points bloquants. Même si ces informations n’étaient pas immédiatement utiles ou actionnables pour chacun, elles apportaient un esprit de cohésion, et permettaient aux équipes, en fonction de leur rôle :
- D’apprendre des autres
- De savoir quand un projet allait impacter leurs ressources
- De résoudre en amont de potentiels problèmes de dépendances.
Par dessus tout, ce rapport hebdomadaire permettait de donner une vision d’ensemble du niveau de risque des projets (“Projects Health”). Si trop de projets étaient At Risk, on devait se poser des questions. Y avait-il trop de projets en cours ? Une équipe sous-staffée ? Une liste de livrables trop ambitieuse ?
Techniquement, cette newsletter était réalisée dans Coda, un outil récemment introduit au Marketing pour le tracking des objectifs (voir article Episode 2 : l’outil de Project Management). Dans l’espace “Marketing Operations” de Coda, chaque chef de projet avait une page dédiée avec la liste de ses projets en cours. Tous les lundi matin, ils devaient mettre à jour leur statut pour chaque projet, en se mettant d’accord en amont avec les acteurs clés de leur mission.
La manager des chefs de projets avait accès à une page qui consolidait toutes les entrées. C’est elle qui envoyait la newsletter après s’être assurée que tous ses chefs de projets avaient bien mis à jour les éléments en accord avec leurs coéquipiers, et discuté avec eux du statut ou du niveau de risque.
L’objectif était d’envoyer la newsletter avant la fin de journée chaque lundi. Cela peut paraître facile, une journée pour préparer un email de statut ! Mais en réalité, ce n’était pas toujours si évident. Il y avait parfois débat sur le niveau de risque et les next steps à afficher. Il arrivait que des conversations avec différentes équipes doivent avoir lieu pour clarifier certains points bloquants avant d’appuyer sur “envoyer”.
Selon moi, au-delà de la visibilité, cette newsletter permettait de faire un check-in régulier sur chaque projet. Le fait de s’obliger à la mettre à jour chaque lundi “forçait” en quelque sorte à faire remonter des points bloquants et à les adresser rapidement, au lieu d’avoir à les communiquer ! Et pouvait donc remettre en moins d’une journée un projet défini comme “At Risk” sur la voie “On Track”.
Enfin, Coda permettant de sélectionner et reformater des données, des informations clés étaient affichées dans un dashboard de reporting utilisé par le management : nombre de projets “At Risk” par mission, nombre de projets “Completed” le dernier mois, etc. Cela permettait par exemple de juger des besoins de réallocations de ressources.
Le rôle du Program Manager dans tout ça ?
- Créer et maintenir les pages Coda pour l’entrée et la consolidation des informations
- Définir et maintenir les listes de diffusion
- Relire la newsletter avant envoi et remonter au VP Marketing Operations les potentiels points à clarifier
- Si besoin, coordonner les conversations nécessaires avant de finaliser le contenu de la newsletter
- Maintenir le dashboard de reporting.
En bref, maintenir l’outil et la mécanique pour assurer la fluidité de ce processus, et faciliter les conversations.