À quoi sert la recherche utilisateur chez The Atlantic : interview exclusive de Gina Bulla

Quand Gina Bulla, Directrice exécutive de la recherche utilisateur chez The Atlantic, s'est inscrite à la newsletter de The Audiencers, j'ai tout de suite voulu en savoir plus sur son rôle. Qu'est-ce que la recherche utilisateur, exactement ? Et particulièrement au sein d'un journal ? Quel type de recherches mène son équipe ? Et comment les résultats sont-ils utilisés pour accroître l'engagement, la conversion et la rétention chez The Atlantic ? Trois mails et une visio plus tard, voici la retranscription de notre conversation…
Gina Bulla

Gina, bonjour. Pouvez-vous nous parler de votre rôle et de celui de votre équipe “recherche utilisateur” au sein de The Atlantic ?

L’équipe “recherche utilisateur” de The Atlantic a été créée en 2019, alors que nous et tant d’autres dans l’industrie commencions à nouer de nouvelles relations avec les lecteurs via les abonnements numériques. À l’époque, je travaillais du côté des insights publicitaires dans notre équipe régie, en cherchant à comprendre ce qui rendait l’audience de The Atlantic unique pour nos marques annonceurs.

Et puis j’ai voulu en apprendre davantage sur notre public, à un niveau plus profond que ce que nous pouvions connaître d’eux grâce aux info socio-démo que nous avons d’eux (âge, genre, lieu géographique…) Au fil du temps, je me suis rendue compte que les insights que nous récoltions pouvaient renforcer notre travail dans toute l’organisation, et pas seulement qu’à la régie pub. Quelques années plus tard, j’ai donc fait pivoter mon poste pour diriger notre équipe de recherche utilisateur au niveau global de The Atlantic.

C’est un nouveau rôle pour moi, mais ce qui a rendu la bascule facile, c’est que la recherche utilisateur est une discipline émergente chez les titres de presse. Il y a donc une opportunité de déterminer ce que ça signifie pour The Atlantic ainsi que pour toute l’industrie. Et d’ailleurs, The Audiencers m’aide à me connecter avec d’autres personnes occupant des postes similaires – donc merci pour cela !

En quoi consiste votre travail, aujourd’hui ?

Je dis toujours que mon travail consiste à écouter les gens. Nous pouvons recueillir tellement de données à partir de nos mesures, et notre équipe de Data Science est experte pour les analyser et leur donner du sens. Mais il y a aussi tellement de questions auxquelles les données ne peuvent pas répondre. C’est là que la recherche utilisateur intervient, pour compléter nos connaissances : pourquoi quelque chose se passe ainsi ? Comment les gens se sentent, quels sont leurs besoins et désirs non satisfaits ?

Il est important pour moi que lorsque nous pensons à la recherche utilisateur, ce ne soit pas simplement pour comprendre notre public actuel, mais aussi notre public potentiel. Bien sûr, nos fans sont une voix incroyablement importante, mais pour vraiment comprendre qui pourraient être nos futurs clients, nous devons également nous connecter avec des groupes qui sont moins (ou pas encore) engagés avec nous.

Et probablement que notre rôle le plus important, c’est de défendre nos lecteurs et de s’assurer que leurs voix sont entendues lors de la création de nouvelles expériences sur nos plateformes…

Comment travaillez-vous ? Quelles sont vos méthodes d’étude et de recherche ?

Nous nous concentrons principalement sur la recherche qualitative, en sollicitant des commentaires oraux, des verbatims de la part des lecteurs actuels et potentiels, en menant des entretiens, en organisant des forums et des sondages. Nous avons également expérimenté les “diary studies”, qui sont des recherches longitudinales permettant de comprendre les habitudes des participants sur une période de temps plus ou moins longues.

Comme cela demande des efforts conséquents aux répondants de participer, nous sommes sélectifs quant au volume de ces activités. Parler à nos lecteurs et abonnés en face-à-face est un privilège, nous voulons donc respecter leur temps, leur vie privée et leurs opinions.

Nous sommes également à l’écoute de nos lecteurs de manière passive. Que perçoit notre équipe de service client ? Que disent les gens sur les réseaux sociaux ? Qu’est-ce qui résonne dans l’industrie ?

Comment décidez-vous des sujets de vos études ?

Nous essayons d’équilibrer les grandes questions importantes qui peuvent nous aider à définir l’avenir de The Atlantic, avec des questions plus spécifiques qui peuvent aider à assurer le succès d’un produit ou d’un projet.

L’une des grandes questions importantes sur lesquelles nous nous concentrons actuellement est : qui seront nos futurs abonnés ? Nous venons de mener une étude pour nous aider à identifier les publics qui pourraient être enclins à s’abonner à The Atlantic dans un proche avenir. Nous utiliserons ces apprentissages pour élaborer des stratégies visant à augmenter la conversion, l’engagement et la découverte.

Comment sont priorisés vos projets ?

C’est probablement l’un de nos plus grands défis ! Chaque département, chez nous, souhaite obtenir des informations sur nos audiences, et nous demande des recherches spécifiques, mais évidemment, nous ne voulons pas saturer notre panel de demandes.

Nous posons alors deux questions pour filtrer les projets :

  • Est-ce que cette étude va amener à quelque chose qui va pouvoir être exploité opérationnellement, c’est-à-dire aider The Atlantic à atteindre ses objectifs ? 
  • S’agit-il vraiment d’une question que notre public peut nous aider à résoudre ?

Votre travail est évidemment lié à beaucoup d’équipes différentes chez The Atlantic, notamment les équipes produits, marketing, éditoriales et de données. Comment vous assurez-vous que chaque équipe est en mesure d’apprendre et d’agir à partir de vos insights ?

La synthèse et la diffusion des résultats sont l’une des étapes les plus importantes de notre processus. Pour presque tous les projets, nous créons un rapport et essayons de le rendre aussi attractif que possible (en ajoutant des visuels, vidéos, etc.). Ensuite, nous le partageons de plusieurs façons : via des groupes Slack, des réunions de présentation de nos résultats auxquelles assistent les parties prenantes de l’ensemble de l’entreprise, des e-mails récap, etc.

De cette façon, la recherche sur le public ne se produit pas dans le vide et ce que nous apprenons peut informer le travail de n’importe quelle équipe.

Pouvez-vous nous donner un exemple de la manière dont vous avez utilisé les résultats d’une étude de votre public pour accroître l’engagement, la conversion et la fidélisation à The Atlantic ?

Nous entendons souvent de la part de nos lecteurs qu’ils manquent de temps pour lire autant de journalisme que ce qu’ils souhaiteraient. Cela nous a incités à réfléchir à la façon dont nous pouvons aider notre public à intégrer The Atlantic dans leur vie de manière plus fluide. Je ne veux pas en dire trop car nous travaillons sur de nouvelles fonctionnalités en ce moment, mais restez à l’affût de ces améliorations prochainement !