La Tech Stack des éditeurs #1 : synthèse des résultats de l’enquête 2021

Tech Stack des éditeurs Tech Stack des éditeurs

Mise à jour du 5 décembre 2022 : Les résultats de l’enquête ‘Tech Stack 2022″ sont disponibles !

En 2021, l’agence conseil Underlines (depuis rachetée par Poool) avait lancé une grande enquête : « La Tech Stack des éditeurs ».

L’objectif initial était de construire un panorama des outils éditoriaux, marketing et revenus mobilisés par les éditeurs de presse en ligne pour publier et monétiser leur contenu. Ce benchmark et son analyse avaient la modeste ambition d’aider la communauté à situer son niveau individuel et collectif de maturité. 

À l’occasion du lancement de sa deuxième édition avec Sciences Po Paris (lire ici), nous publions pour la première fois, dans son intégralité, la synthèse des résultats de l’étude 2021.


Introduction

Qui nous sommes

Underlines est une agence conseil créée à Paris en 2019. Notre mission est d’aider les éditeurs de contenus en ligne à augmenter leur revenu par lecteur. (En 2021, Poool (éditeur de The Audiencers) a racheté Underlines et a intégré ses compétences au sein de son pôle Customer Success.)

Underlines a collaboré avec Maxime Hanssen pour l’analyse des données, la structuration des enseignements clés et la rédaction du propos de cette étude. Journaliste économique et manager éditorial, il a participé au repositionnement stratégique et à la création de plusieurs titres. Avec une obsession : que l’environnement tech puisse répondre aux aspirations éditoriales et business.

Pourquoi nous avons lancé cette enquête

Officiellement, pour construire un panorama des outils tech & marketing que les éditeurs de presse en ligne français utilisent pour publier et monétiser leur contenu.

Officieusement, parce que les questions qui nous étaient posées en tant que conseil semblaient souvent tourner autour des mêmes problématiques : quels outils pour nouer une relation durable avec nos lecteurs ? Qu’utilisent les autres éditeurs ? Est-ce qu’il existe une “stack” qui serait plus adaptée qu’une autre aux stratégies d’abonnement numérique ? 

Une enquête pensée pour vous, réalisée avec vous

Il est très probablement difficile, dans votre quotidien chargé, de lever la tête du guidon et de questionner vos outils, alors même que la to-do à accomplir sur chacun s’allonge chaque jour. 

Bien sûr, les exigences, votre histoire et le rythme ne sont pas forcément les mêmes si vous êtes un titre installé ou émergent, un pure player, un bi-média ou un média audiovisuel. Mais vous évoluez tous dans le même contexte : celui de la transition numérique à marche forcée. Votre objectif est identique : atteindre la maturité tech. 

Dans ce contexte de flux tendu permanent, il n’est sans doute pas facile pour vous de prendre le temps de confronter la tech stack de votre entreprise de presse à ses objectifs stratégiques, notamment en termes d’audience et de monétisation. 

Surtout, vous vous demandez comment font vos confrères face aux nombreuses contraintes que vous rencontrez et quels outils ils utilisent en fonction de leurs besoins. 

Vous vous questionnez également sur la gestion des ressources humaines et celle des lignes budgétaires à tenir. Bref, vous rêvez d’un éclairage extérieur pour vous aider à être meilleur. 

C’est pour cela qu’en avril 2021, nous avons lancé cette grande enquête, intitulée “La Tech Stack des éditeurs”. 

Nous sommes fiers de vous présenter les résultats de la première édition.  

Voici comment nous avons travaillé 

Du 7 avril au 7 mai 2021, vous avez été une centaine à répondre à notre questionnaire de 7 minutes accessible librement en ligne. Après dépouillement et croisement des données, nous avons retenu 72 réponses complètes. 

Cette consultation s’articule autour des trois grandes familles au cœur de l’activité numérique des entreprises de presse : Éditorial, Marketing, Revenus.

Ces 3 familles s’expriment dans 17 catégories distinctes, que nous avons aussi appelées briques. Les voici :

EDITO

  • CMS
  • Lecteur vidéo
  • Lecteur audio
  • Liseuse PDF

MARKETING

  • Push notifications
  • Outils d’engagement : commentaires, débats, sondages
  • Data Visualisation
  • CMP (Consent Management Platform)
  • Analytics
  • A/B Testing
  • DMP/CDP (Data Management Platform / Customer Data Platform)
  • Marketing automation
  • Datalake
  • E-mailing / CRM

REVENUS

  • Adtechs
  • Paywall
  • Gestionnaire d’abonnements

Vous trouverez une définition de chaque brique dans le lexique à la fin de ce document.

Pour chacune d’entre elles, les sondés ont renseigné les outils utilisés (parfois plusieurs) et attribué une note (de 1 à 3) à leurs solutions éprouvées sur le terrain. Au terme du parcours, le répondant était appelé à noter (de 1 à 10) l’adéquation de sa tech stack avec les objectifs stratégiques du média. Underlines a ensuite analysé les résultats brique par brique, outil par outil, ligne par ligne, en les croisant avec les différentes typologies d’éditeur, pour tenter de faire parler les données et ainsi leur donner une coloration synthétique et éditorialisée. 

Qu’allez-vous lire ?

L’objectif initial est de construire un panorama des outils éditoriaux, marketing et revenus mobilisés par les éditeurs de presse en ligne pour publier et monétiser leur contenu. Ce benchmark et son analyse ont la modeste ambition d’aider la communauté à situer son niveau individuel et collectif de maturité. 

Chaque membre peut aussi trouver, dans cette étude, des bonnes pratiques pour améliorer et atteindre ses objectifs stratégiques et augmenter ses revenus lecteurs. L’éditeur pourra également y pêcher les meilleures solutions du marché pour chaque catégorie, découvrir comment ses pairs utilisent chaque brique technologique et les meilleures combinaisons entre les outils.

Enfin, le lecteur naviguera dans les arcanes internes de la réalité d’un pilote de tech stack. Dans un environnement contraignant et en perpétuelle évolution, on abordera, à travers vos retours d’expérience, les enjeux des ressources humaines et budgétaires, le poids de l’héritage technique dans les évolutions futures, la complexité de jongler avec des nombreux outils et l’importance des relations avec les prestataires. 

Les limites de notre travail 

Cette enquête participative est uniquement basée sur un questionnaire ouvert. Elle manque donc parfois de données structurelles pour assurer une mise en contexte globale et revendiquer une valeur scientifique et académique. 

Certains répondants ont rempli le questionnaire pour leur titre individuel… D’autres pour leur groupe (Uni-médias, Condé Nast, Les Echos-Le Parisien). Nous n’avons rien dissocié ou associé, et avons laissé tel que.

Nous avons également omis (1ère édition oblige, il faut bien essuyer les plâtres !) de vous demander de nous communiquer vos budgets annuels, la durée moyenne de votre roadmap, ainsi que les effectifs RH dédiés à la gestion de votre tech stack. 

Enfin, la méthode de notation des outils – de 1 à 3 – ne permet pas de marquer visuellement les écarts. Promis, on fera mieux l’an prochain :-) 

Les participants

72 éditeurs participants, répartis comme suit :

Les 72 éditeurs répondants

I. Une maturité tech stack moyenne, volatile et soumise à condition (enseignements généraux)

Noter sa propre tech stack, une photographie à un Instant T et peu objective 

Évaluer sa propre tech stack pour un média est un exercice difficile tant l’environnement est multiple, complexe et mouvant. C’est donc une photographie à un temps T. Au terme d’un parcours passant par les 17 catégories du questionnaire et un passage en revue de leurs outils associés – notés et commentés – les 72 éditeurs du panel se sont livrés à cette tâche subjective. 

La subjectivité est ici importante car elle balaie des composantes personnelles : exigence individuelle, ressenti de la dynamique tech au sein de l’entreprise de presse, expertise sur le sujet. Mais elle est également à relativiser : elle se construit sur une expérience, des réussites et des échecs, en somme par une réalité de terrain. 

Enfin, cette évaluation générale doit se lire à l’aune des différences de typologie des éditeurs ayant répondu à l’étude : chaque entité ne part pas du même point de départ, n’a pas la même histoire tech stack, ni la même culture et surtout, pas forcément les mêmes besoins (ni les mêmes budgets !)

5,7/10 : c’est la moyenne générale attribuée par les 72 éditeurs afin d’évaluer leur tech stack par rapport à leurs objectifs stratégiques.

Au regard de la moyenne générale révélée ici, on constate que le panel, dans une lecture générale, semble toujours être en phase de transition numérique. Mais ce mouvement est avancé, poussé notamment par les besoins de monétisation et de stratégie premium. Il y a une véritable conscience des enjeux, sans toutefois une appropriation totale par les éditeurs des réponses techniques à disposition. Ce commentaire d’un éditeur, spécialisé dans la presse économique, est assez révélateur de la dynamique collective à l’œuvre  :

“On n’est pas bon. On le sait. On prend les choses dans l’ordre. Le sujet n’existait pas dans les équipes il y a un an.”
Note attribuée : 5/10

Une étude plus minutieuse de l’évaluation attribuée par chaque éditeur révèle de fortes disparités. 

Il faut tout d’abord noter que seuls six éditeurs ont attribué la note de 5.
17 ont attribué la note de 6, proche également de la moyenne générale. 

“Nous sommes en retard. Dans un premier temps, on remet à plat la partie abonnement. Le reste : à suivre…”
Note attribuée : 4/10

On constate donc que la moyenne est fixée par de fortes disparités, entre des éditeurs qui s’estiment dans une transition à dynamique faible (20 éditeurs s’attribuent une note de 1 à 4) et d’autres entreprises de presse satisfaites de leur tech stack actuelle (29 éditeurs attribuent une note égale ou supérieure à 7). 

“Notre stack tech n’a cessé d’évoluer pour grandir avec nos business digitaux. C’est une stack pragmatique directement en connexion avec nos besoins et nos moyens. Nous avons la chance de pouvoir profiter de solutions élaborées avec des moyens réduits.”
Note attribuée : 8/10

“Notre stack tech est efficace mais loin d’être optimale”
Note attribuée : 7/10

Notes attribuées par les 72 éditeurs répondant à la question “Comment décririez-vous l’adéquation de votre stack tech & marketing à votre stratégie ?”

Pour en savoir plus sur la maturité des membres de notre panel au regard de leurs objectifs stratégiques, nous avons affiné les moyennes en fonction de deux éléments que nous avons estimé importants : le type d’offres (gratuit ou payant) et le type d’éditeur (pure-player ou bimédia – print/web). 

Des maturités et des satisfactions différentes en fonction du média 

Maturité tech stack et famille de presse

Les 53 éditeurs issus de la famille “Print + web” affichent un taux de satisfaction de 5,4.
Les 15 éditeurs issus de la famille “Pure player” affichent un taux de satisfaction de 5,9, soit 0,5 point en plus que leurs confrères bi-média. 

Les pure-players semblent un peu plus avancés dans leur chantier tech. Ce résultat pourrait s’expliquer par une culture numérique plus prononcée et un héritage tech plus léger (voir chapitre 3.B). Au sein même de cette famille, il existe des disparités entre les jeunes médias aux équipes restreintes et ceux établis depuis plusieurs années. 

“Les besoins sont relativement couverts et en adéquation avec les valeurs de notre pure-player de presse généraliste nationale”
Note attribuée : 7/10
 

Le détail des scores des éditeurs “print + web” révèle là aussi une grande disparité de maturité. Mais les commentaires qui reviennent souvent évoquent de nombreuses réflexions en cours et des projets en voie de déploiement.  

“Nos solutions font le minimum vital mais nous avons un besoin d’évolution/amélioration”.
Note attribuée : 5/10 

Offre payante ou gratuite : un niveau de maturité un peu plus élevé pour les éditeurs qui monétisent leur production 

La proposition d’une offre payante ou au contraire un accès possible sans abonnement influe légèrement sur la maturité tech de l’éditeur. Ceux qui monétisent directement leur production éditoriale affichent une maturité supérieure de 0,3 point. 

Maturité tech stack et offre premium

Les 48 éditeurs qui proposent une offre premium annoncent une moyenne de satisfaction de leur tech stack à hauteur de 6,1/10.

Les 24 éditeurs qui ne proposent pas d’offre payante affichent une satisfaction de leur tech stack à hauteur de 5,8/10

Les plus “gros” sont-ils plus avancés ? 

Et bien à priori non : les sites des entreprises de presse les plus visités n’ont pas le droit à un bonus à la maturité. Les éditeurs qui font partie du TOP 100 ACPM affichent en effet un taux de satisfaction de 5,4.  Au contraire, les entreprises non intégrées à ce classement de référence déclarent une note de satisfaction de leur tech stack à hauteur de 5,7.

« Des outils sont en place, mais ils ne permettent pas d’avoir une vision utilisateur consolidée et activable. Nos outils sont loin de permettre de mettre en place la vision et la stratégie autour de l’abonnement et de l’offre numérique. »
Note attribuée : 4/10
, éditeur membre du top 100 ACPM

“Nous sommes finalement assez bien équipés, maintenant nous devons optimiser pour certains outils notre usage pour pousser encore plus loin notre stratégie numérique”.
Note attribuée : 7/10, éditeur membre du top 100 ACPM

“Il y a un an et demi, j’aurais probablement attribué une note de 2… Nous avons développé de nombreuses solutions pour qu’elles soient à la hauteur de nos ambitions, mais le chantier est grand et tout ne peut pas être fait en même temps.”
Note attribuée : 6/10, éditeur membre du top 100 ACPM

A retenir :

A première vue, homogénéité des résultats quelles que soient les caractéristiques de l’éditeur : pure-player, bimedia, offre numérique payante ou non payante.   Mais dans le détail, de fortes disparités apparaissent : des éditeurs très matures, d’autres en phase de transition numérique basse. Les pure-players semblent avoir un léger avantage en termes de maturité, ainsi que les entreprises ayant intégré une offre premium. 

II. Le grand mix des outils : entre maîtrise et grand flou (enseignements particuliers)

La maturité technologique moyenne (5,7/10) des éditeurs au regard de leur objectif stratégique cache, comme nous l’avons vu, de fortes disparités. Il faut donc entrer dans les détails statistiques des catégories et des outils utilisés par les entreprises de presse pour apprivoiser plus précisément leur situation tech.  

→ Un point méthodologique ici s’impose : alors que les éditeurs notaient précédemment leur tech stack générale sur une note de 1 à 10, ils évaluent ici la maturité de chaque brique technologique de 1 à 3. D’autre part, ils n’évaluent plus leur propre mix tech – via une note globale – mais les outils qu’ils utilisent. 

Nous avons classifié les 17 briques technologiques en trois familles d’usages : un usage éditorial (4 items), un usage marketing (10 items), un usage revenus (3 items).

  • Famille éditoriale : 2,2. Les outils utilisés par les éditeurs pour mener les opérations éditoriales recueillent une moyenne de 2,2/3.
  • Famille marketing : 2,2 Les outils utilisés par les éditeurs pour mener les opérations marketing recueillent une moyenne de 2,2/3.
  • Famille revenus : 2,00  Les outils utilisés par les éditeurs pour mener les opérations marketing recueillent une moyenne de 2/3.

On constate donc que les éditeurs semblent plus satisfaits des outils éditoriaux et marketing plutôt que ceux destinés à générer des revenus. Mais cela ne traduit pas pour autant leur maturité dans le domaine. Il faut pour cela se plonger dans les taux d’équipements des éditeurs, brique par brique. On constatera une scission très forte dans le tech stack entre les briques pleinement intégrées par les entreprises de presse, et celles qui sont encore des oiseaux rares au sein des rédactions. 

Les briques technologiques totalement apprivoisées par les éditeurs

Une brique tech est ici considérée comme apprivoisée par les éditeurs si elle est utilisée par au moins 40 d’entre eux (sur les 72 du panel), dont plus de 55% des répondants. Les données recueillies montrent que 12 des 17 catégories sont extrêmement bien intégrées au sein des entreprises de presse. 

Part d’éditeurs étant équipés de chaque brique technologique

A noter

  • PAYWALL : 49 éditeurs, soit 68,8% possèdent une ou plusieurs solutions de paywall. 23 ne sont pas équipés, souvent par absence de stratégie premium.  
  • LECTEUR VIDÉO : 64 éditeurs, soit 88,9% sont équipés d’une ou plusieurs solutions de lecture. On remarque toutefois que l’utilisation, d’un média à un autre, peut être très différente. Certains ont une véritable stratégie vidéo tandis que d’autres “hébergent” seulement des contenus “one shot”. 
  • OUTIL DE DATAVISUALISATION STRATÉGIQUE : 55 éditeurs, soit 76,4% des éditeurs utilisent un, deux ou trois outils de datavisualisation pour piloter leur stratégie.

Des briques technologiques en train de s’affirmer chez les éditeurs

C’est la dure loi des moyennes et des règles : le lecteur audio aurait pu passer dans la catégorie pleinement intégrée, mais il reste à la porte avec ses 39 éditeurs du panel qui sont équipés, soit moins de 55% des sondés équipés. On constate toutefois que le lecteur audio est en train de trouver sa place dans les plateformes web, signe de la multiplication des produits podcast et de la fonctionnalité lecture audio des articles. 

Les trous dans la raquette : ces briques technologiques encore rares

De nombreuses briques sont encore très souvent absentes du tech stack des éditeurs. Il s’agit surtout d’outils marketing très avancés, qui s’intègrent souvent après la mise en place d’un mix tech de base efficace et fonctionnel.  

Part d’éditeurs étant équipés de chaque brique technologique

Les étoiles d’or : ces solutions plébiscitées par les éditeurs 

Les éditeurs devaient expliciter les outils qu’ils utilisent pour répondre aux besoins de chaque brique technologique. Nous avons répertorié les solutions ayant la meilleure note et les plus mentionnées par les entreprises de presse.

Ces solutions sont disponibles sur le marché de façon gratuite ou payante ou encore fabriquées maison. Leur récurrence pourrait signifier qu’elles sont ultra-dominantes car performantes, ou dans d’autres cas, qu’une offre limitée les impose de fait. Enfin, les contraintes réglementaires dopent l’utilisation de certains outils, comme pour les briques CMP et Analytics.   

Des outils qu’on adore… à ceux qu’on honnit

Parmi les outils cités par nos répondants, il y a les marques qui semblent des évidences…

“Batch, what else ?”

Et des secteurs d’intervention qui sont un éternel “pain point”. Le gestionnaire d’abonnements au premier rang.

“Notre outil est vieillissant. Surtout, la gestion des abos numériques et print est effectuée dans des outils séparés.”

“Notre outil est pensé en mode print. C’est une catastrophe pour gérer le web et surtout le suivi client.”

Note moyenne par brique technologique

Le podium des solutions

Pour chacune des 17 briques technologiques, nous avons retenu les 3 solutions les plus citées et vous proposons ici une vue sur les mieux notées.

Les outils qui ne vont plus faire long feu

Les pivotements stratégiques constatés vers la monétisation se confirment dans les besoins des éditeurs. Ils cherchent à s’équiper, optimiser ou upgrader les outils pour réussir leur objectif. 

A la question “Quels outils êtes-vous le plus susceptible de changer bientôt?”, on constate ainsi que 9 entreprises envisagent de renforcer leur stack liée à la gestion de leurs abonnements et 6 veulent s’équiper d’un paywall ou migrer vers une autre solution. 

Les briques marketing sont également au cœur des futures évolutions, avec un prisme très fort sur la gestion des données. La brique CRM/emailing est citée par 13 éditeurs, pour des besoins qui tournent autour du CRM plus que de l’e-mailing, et le marketing automation 6 fois. 

Enfin, la famille éditoriale est aussi concernée, notamment pour la catégorie CMS : 11 éditeurs sur 72 envisagent des futurs développements. 

A RETENIR :Les briques technologiques de base – éditoriales et marketings – sont désormais pleinement intégrées dans la tech stack des éditeurs. Celles liées aux revenus sont encore légèrement en retrait. 
Les briques technologiques avancées – particulièrement celles liées au web-marketing / centralisation des données – restent le privilège de quelques éditeurs qui commencent à s’équiper.
Pour certaines briques technologiques, des solutions s’imposent sur le marché, soit par le rapport qualité/prix, soit par les contraintes légales (Ex : AT Internet, certification des audiences). 

III. S’équiper, évoluer et innover dans un environnement contraignant : les défis

Gérer les ressources humaines limitées et les contraintes de temps

La problématique des ressources humaines limitées et du manque du temps est centrale dans le déploiement et la bonne utilisation de la tech stack d’un éditeur. Les remarques des participants appuient très fortement sur ce point, aussi bien dans l’évaluation globale que lors de l’analyse par brique technologique et leurs solutions. Ce challenge concerne petits et grands éditeurs. L’enjeu est également managérial et culturel : lorsque les conditions de temps et de main d’œuvre sont réunies, il faut encore réussir à faire monter en compétence les équipes pour intégrer ces nouvelles briques technologiques et mettre en pratique efficacement leurs solutions dédiées. L’une des clés réside dans la vision éclairée que doit donner la direction afin de choisir les briques et les outils afin de maximiser les chances de réussir la stratégie poursuivie, même dans le cadre de ressources restreintes.  

“Manque de temps pour optimiser tout cela”

“Il nous manque pas mal de briques mais nous n’avons de toute façon pas la possibilité de les intégrer à date par manque de ressources.”

“Nous n’avons pas assez d’équipes formées pour une bonne prise en main des outils et pour pouvoir en tirer justement une stratégie.”

“Je remarque une très faible appétence interne aux datas et à leurs possibilités. C’est long à venir.”

“Ce sont des projets complexes à appréhender et à porter en interne”

“Tech Stack manipulable, performante, mais pas encore totalement déployée ou utilisée par tous dans les équipes”

“On pourrait mieux faire, mais nous n’avons pas la compétence en interne et pour la plupart de nos outils, nous faisons avec l’existant si ça fonctionne et nous ne cherchons mieux que lorsque l’on rencontre des soucis.”

Faire face aux contraintes budgétaires

Les éditeurs composent avec des budgets de développement parfois serrés dans un contexte où chaque nouvelle brique peut représenter un investissement important. La gestion de la roadmap doit être au cordeau sans quoi, une dette technique peut s’accumuler et bloquer les développements. D’autres utilisent la bidouille pour maintenir une tech stack répondant aux besoins stratégiques, n’hésitant pas à tordre certains outils pour multiplier leurs fonctions technologiques. 

“Nous avons la chance de pouvoir profiter de solutions élaborées avec des moyens réduits.”

“Dette technique, petite équipe, transformation en cours”

“Avec le temps et la transformation digitale, besoin d’investissements forts” 

S’adapter à la multiplication des outils

Aussi bien à travers l’analyse des données statistiques que par les commentaires des participants, notre étude révèle le nombre très élevé de solutions utilisées par les éditeurs. Les 17 briques technologiques analysées nécessitent bien souvent, pour chacune d’entre elles, l’utilisation d’un ou plusieurs outils. Le combo peut parfois être impressionnant. La brique “Adtech” est significative : 27 éditeurs, sur les 50 équipés, utilisent 3 solutions ou plus. Un éditeur utilise même 6 outils ! L’analytics est également une autre brique qui génère une multitude de solutions. 35 éditeurs utilisent au moins deux outils pour répondre à leurs besoins.   

 

“Beaucoup d’acteurs différents avec des interconnexions pas toujours au point. Complexité de la mise en oeuvre”

“Il y a beaucoup d’outils parfois sur des sujets très compliqués dont il est souvent difficile d’estimer l’apport de valeur”

“Beaucoup de manque et beaucoup d’outils différents”

“Beaucoup d’adtech différentes pour de nombreux formats. Cela renforce la complexité dans cette gestion multi-partenaires”

Composer avec les vestiges technologiques

L’irruption d’un nouveau besoin technologique pour répondre à un tournant stratégique, ou alors pour rendre plus performantes des briques déjà en place, peut s’avérer compliqué à mettre efficacement en œuvre au sein de l’architecture technique déjà en place. Le rapport coût/bénéfice peut alors être une variable décisionnelle décisive. 

On constate une tendance – réelle mais encore minoritaire – aux développements maison afin de maîtriser l’ensemble de l’écosystème technique. Par exemple, 12 éditeurs ont développé leur outil CMP, 19 ont construit leur CMS, 13 ont bâti leur gestionnaire d’abonnement, 9 ont créé leur solution d’engagement. 

Sur les 17 briques technologiques du panel, on constate que seules cinq d’entre elles ont été construites “maison” par au moins 10 éditeurs (sur les 72) La catégorie CMS est la plus prisée des développeurs internes, avec 21 occurrences.

Niveau efficacité et satisfaction, on constate que le “fait maison” ne garantit pas une meilleure performance. 

“Gros millefeuille hérité de pratique ancienne. Efficace mais pas très fluide, chronophage pour certaines choses simples mais comme on y est habitué ça roule tout seul.”

“Certains outils trop obsolètes et difficiles à changer.”

“Pas assez investi dans des outils maison ce qui crée un patchwork de solutions qui marchent difficilement entre elles parfois. Un changement de culture en cours”

Avoir confiance dans la relation client/prestataire

Plusieurs éditeurs mentionnent le rôle clé de la relation client-prestataire dans la réussite de la road map. Les commentaires sont assez tranchés : quand les partenariats fonctionnent bien, les éditeurs le mentionnent avec enthousiasme… et avec foudre quand ce n’est pas le cas. 

Les multiplicités des briques et des solutions imposent de nombreuses relations commerciales et techniques, ce qui est souvent estimé comme chronophage. On constate également qu’il n’est pas toujours aisé de composer avec des profils de prestataires parfois très différents : ici des startups, là des entreprises techniques implantées depuis des années ou encore des grandes sociétés internationales.  

“Des relations compliquées avec des promesses commerciales peu souvent en phase avec la réalité du marché. Se présentent comme des partenaires mais restent à l’affût de la moindre faille. Des solutions qui privilégient systématiquement le pire pour les utilisateurs. L’enfer au quotidien.”

“On est assez contents du mix « petits partenaires tech à l’écoute » et « acteurs phares du marché ». Convient bien à un petit éditeur indépendant comme nous.”

“Très bon suivi et bonne relation mais dette technique importante”

“Prestataire plutôt sérieux mais qui s’envisage comme un partenaire et qui souhaiterait faire avancer des projets qui ne sont pas des priorités pour l’éditeur. Chaque petite évolution fait l’objet d’un surcoût, à intégrer avant de s’engager.”

Nouvelles briques technologiques : la mainmise des géants américains

Dans la partie 2, nous évoquions les briques technologiques encore rarement implantées chez les éditeurs : DMP – Datalake – Marketing automation – A/B Testing. 

Nous pouvons constater, chez les éditeurs ayant déjà appréhendé ces technologies, une mainmise des grandes entreprises américaines sur ces solutions,  et l’inquiétude de certains éditeurs français 

Par exemple, pour les Datalakes, sur les 25 éditeurs équipés, 22 utilisent des outils proposés par la “Big tech” américaine : 16 Google Big Query, 5 Amazon S3 Redshift et 3 Microsoft Azure, contre seulement cinq qui ont développé un outil maison. 

Quant à l’A/B Testing, 13 éditeurs utilisent Google Optimize, 9 AB Tasty, pour seulement trois solutions maisons. 

“Nous nous sentons prisonniers de Youtube et des GAFAM”

A RETENIR : 
Un déficit de ressources humaines, budgétaires et de culture numérique au sein de nombreux titres de presse.
Un nombre d’outils trop élevé, et souvent trop éclaté en fonction des besoins.
Une tendance à la réappropriation par les éditeurs de certaines briques technologiques via des outils “maison”.

Conclusion : des stratégies “reader-centric”… mais une connaissance lecteur éclatée

Par Marion Wyss, co-fondatrice d’Underlines

C’était un pressentiment au moment de lancer cette enquête, c’est une certitude aujourd’hui : l’équipement des éditeurs concernant la connaissance lecteur est largement insuffisant pour mener des stratégies dites “reader-centric” ou “user-centric”. Parmi lesquelles évidemment : les stratégies d’abonnement.

Les bases de données sont multiples, anciennes, ne communiquent pas entre elles. Le service abo a la sienne, l’outil d’e-mailing une autre, les CMS parfois une troisième. Rajoutez à cela les data comportementales mesurées par les outils d’analytics, et les DMP souvent pilotées par la pub. Où se retrouvent toutes ces données pour permettre une vision complète de votre utilisateur ? Nulle part. Ou presque.

“Le point difficile pour nous se situe au niveau de la data. Nous manquons d’un outil « magique » qui réunisse tout et qui soit accessible financièrement parlant.”

Nous l’entendons de plus en plus souvent, la mode est aux “AI prédictive”. Le fantasme : qu’une machine (qui apprendrait toute seule, cela va de soi), puisse déterminer le meilleur endroit, le meilleur moment, le meilleur message et la meilleure offre pour convertir votre lecteur gratuit en abonné loyal.

L’idée est séduisante, bien sûr. Elle nous semble, au vu de l’état des tech stack, un peu précoce.

La mise en place d’une Customer Data Platform centralisée pour nourrir ces futures intelligences et piloter l’engagement : le projet de toutes les roadmaps du moment ?

Lexique

EDITO

  • CMS (Content Management System) : application utilisée pour gérer le contenu d’un site web qui permet à plusieurs contributeurs de créer, modifier et publier. 
  • Lecteur vidéo : Outil permettant de jouer une vidéo sur un support numérique.
  • Lecteur audio : Outil permettant de jouer une vidéo sur un support numérique.
  • Liseuse PDF : Outil de feuilletage numérique d’un document PDF de plusieurs pages.

MARKETING

  • Push notifications : Messages courts envoyés par un éditeur à ses utilisateurs qui ont souscrit à ce service, notamment lorsque l’application n’est pas ouverte ou le site web pas consulté. Deux modèles principaux : push web (via le navigateur) et push mobile (via les applications natives iOS & Android).
  • Outils d’engagement : Outils permettant le dépôt de commentaires, la tenue de débats ou sondages en ligne.
  • Data Visualisation : Représentation graphique d’informations et de données, de manière dynamique.
  • CMP (Consent Management Platform) : Technologie utilisée par les sites web pour obtenir les consentements légaux des utilisateurs afin de traiter leurs données personnelles, généralement par le biais de cookies et de traceurs en service sur le domaine.
  • Analytics : Outil qui permet d’analyser des données comportementales de navigation d’un site web ou d’une application mobile dans le but d’en tirer des enseignements. 
  • A/B Testing : Méthode de comparaison de deux versions d’une page web ou d’une partie de page afin de déterminer laquelle est la plus performante sur la base d’indicateurs communs.
  • DMP/CDP (Data Management Platform / Customer Data Platform) : Plateforme centralisant la collecte, l’organisation et l’activation de données d’audience de premier, deuxième et troisième plan, quelle que soit la source.
  • Marketing automation : Logiciels permettant d’automatiser les campagnes et les activités marketing tout au long du parcours de l’acheteur, depuis les premières interactions avec le client jusqu’au support après-vente, souvent selon des séquences définies à l’avance.
  • Datalake : Méthode de stockage central de données volumineuses provenant de nombreuses sources dans un format brut ou très peu transformé.
  • E-mailing / CRM (Customer Relationship Management) : Outil permettant de gérer toutes les relations et interactions de votre entreprise avec les clients et les prospects via le canal e-mail.

REVENUS

  • Adtechs : Ensemble de logiciels et d’outils utilisés par les annonceurs, les agences publicitaires, les éditeurs et d’autres acteurs du secteur pour la planification stratégique, la gestion et la diffusion de leurs activités de publicité ou de monétisation.
  • Paywall : Outil employé par un éditeur en ligne pour restreindre l’accès à son contenu.
  • Gestionnaire d’abonnements : Plateforme qui permet de gérer les formules d’abonnement, les comptes et accès des abonnés, et de contrôler les revenus récurrents générés.

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