Skip to content Skip to footer

« Le SEO met son nez dans les affaires de presque tous les métiers » – Interview de Simon Gleize, consultant SEO pour les médias

Hello Simon, peux-tu te présenter ?

Je commencerais par dire que je suis un passionné du monde des médias. Et que c’est un univers dans lequel je navigue depuis bientôt 15 ans. D’abord en tant que journaliste et responsable de l’édition de Londres de lepetitjournal.com, un pure player avec des éditions locales réparties tout autour du globe.

Ensuite chez liligo.com, comparateur de billets d’avion, d’hôtels et de location de voitures, en tant que responsable éditorial avec le lancement de leur média de marque et le management d’une équipe internationale de rédacteurs.

Et depuis plus de 7 ans maintenant en tant que consultant SEO en freelance. J’accompagne désormais presque exclusivement des médias ou des entreprises qui ont la volonté de développer une marque média.

Quelles sont les missions que tu effectues pour les médias ? 

Elles sont multiples et évoluent souvent au cours du partenariat. Mais au départ, il y a 3 cas de figures principaux :

1. Le client a identifié une baisse de son trafic SEO et ne sait pas comment l’interpréter et la corriger.

Il peut donc faire appel à moi pour analyser cette chute, lui faire des recommandations en fonction des conclusions de cette analyse puis si besoin l’aider à implémenter les différentes recommandations. 

Récemment, je suis par exemple intervenu auprès d’un média professionnel qui constatait une forte chute de trafic mais ne parvenait pas à en trouver la cause. Ici l’exercice consistait donc dans un premier temps à croiser un maximum de données (différents outils analytics mais aussi Google Search Console) pour essayer de comprendre à quelle date la chute avait commencé, quels contenus étaient concernés et depuis quelle source de trafic.

Ce travail d’analyse est important car, souvent, le premier réflexe est d’avoir peur d’une « pénalité Google », soit parce qu’une mise à jour de l’algorithme a eu lieu récemment, soit parce que les équipes techniques sont intervenues sur le site. Les équipes marketing regardent les chiffres d’audience au quotidien et la moindre baisse devient une source d’inquiétude importante qui entraine des réactions à chaud, surtout dans un contexte économique tendu. C’est une réaction tout à fait normale mais il est primordial de laisser passer quelques jours ou semaines pour pouvoir s’appuyer sur suffisamment de données. Puis d’analyser ces dernières avec suffisamment de recul.

En l’occurrence, dans ce cas précis, la baisse n’avait rien à voir avec un problème de référencement. Mais avec un problème de tracking combiné à une actualité moins riche que sur la période précédente. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, mon rôle consiste donc aussi parfois à écarter l’hypothèse SEO :)

2.    Le client lance une refonte de son site média. C’est le moment idéal pour intégrer la dimension SEO à tous les niveaux (technique, performance, design, UX, rubriquage, etc.). 

J’ai par exemple le cas d’un client, pure player d’info quotidienne, qui en est à sa deuxième refonte complète depuis que nous nous connaissons et qui m’a sollicité les deux fois. D’abord en 2017 pour intégrer la dimension SEO à tous les étages et suivre le projet de A à Z. Puis à nouveau fin 2022 pour une liste de préconisations SEO à intégrer dans sa nouvelle refonte pour à la fois :

  • corriger tout ce qui n’avait pas pu être fait en 2017 pour des raisons budgétaires ;
  • se mettre au niveau des exigences 2023 de Google ;
  • Intégrer une solution paywall compatible avec un bon référencement.

3.    Le client veut développer son audience SEO mais n’a pas la compétence en interne et souhaite être accompagné sur le long terme.

Dans ce cas précis, mes interventions sont très variées et souvent multiples : de l’audit à la formation, en passant par l’élaboration de la stratégie, le monitoring de la performance SEO ou encore la création d’un « backlog SEO » et le suivi des implémentations.

Dans certains cas, j’essaie aussi d’être présent quasi quotidiennement en support de la rédaction pour leur proposer des sujets, leur montrer ce qui a bien fonctionné ailleurs, identifier des articles à fort potentiel mais surtout leur donner un maximum de feedback sur ce qui a pu expliquer le succès ou au contraire l’échec d’un article en terme de visibilité sur Google.

Ce type d’accompagnement commence au départ pour quelques mois et se poursuit avec certains depuis de nombreuses années !

Quelles sont les premières actions que tu effectues quand tu démarres une mission de SEO pour un média ?

Tous les projets commencent de la même manière : par un audit SEO du site. C’est le point de départ indispensable à la fois pour me permettre de m’imprégner du média, de sa ligne éditoriale, de son fonctionnement et pour bien sûr identifier les forces et faiblesses de celui-ci en matière de référencement.

De cet audit va découler une liste d’actions à mettre en place que l’on va prioriser en fonction de différents critères :

  • l’impact attendu ;
  • Les objectifs prioritaires du client ;
  • La difficulté et les ressources nécessaires et disponibles.
Exemple de backlog SEO

Quels sont les points les plus récurrents que tu fais travailler à tes clients médias ?

Chaque cas est unique car aucun site n’est au même niveau. Notamment d’un point de vue technique. Mais ces dernières années, on a beaucoup travaillé sur la performance et les temps de chargement. Ainsi que sur l’implémentation des paywalls et leur compatibilité avec une bonne stratégie SEO.

On travaille aussi beaucoup sur l’optimisation du budget crawl car on constate que depuis quelques années Google a de plus en plus de mal à crawler l’ensemble des contenus d’un site web. Il est donc devenu primordial, via une navigation optimisée et une bonne organisation des contenus sur le site, d’orienter les robots vers les contenus à plus fort potentiel. On optimise donc le linking interne des pages d’agrégation (homepage, rubriques, pages auteur, pages tag…). Mais aussi le linking interne depuis les pages articles à la fois dans le corps du texte de la part des journalistes mais aussi grâce à l’ajout de blocs de renvois dédiés. L’objectif est double : inciter le lecteur à consulter plus d’articles et aider les robots à découvrir des contenus prioritaires. Enfin, on fait également la chasse aux contenus de mauvaise qualité qui ne sont pas indexés ou trop mal référencés pour générer du trafic et qui font perdre du temps à Google lors de ses passages sur le site. Une fois ces contenus identifiés, il faut décider s’ils méritent d’être mis à jour, enrichis, réutilisés ou s’il faut tout simplement les rendre inaccessibles pour les robots ou s’en débarrasser. 

Dans le même registre se pose aussi la question en ce moment des urls AMP, un format que Google a poussé pendant un temps pour finalement l’abandonner aujourd’hui. Ces pages sont de moins en moins visibles et génèrent donc de moins en moins de trafic. De nombreux médias se posent donc aujourd’hui la question de l’abandon de ce format. Et de la méthode la moins douloureuse pour supprimer l’existant sans trop affecter la technique et le trafic.

Enfin, la formation des équipes éditoriales et la diffusion des bonnes pratiques SEO prennent aussi une place importante. Que ce soit en terme de rédaction, d’editing ou de recherche de sujets, il est primordial d’accompagner les journalistes. D’autant plus que l’environnement sur lequel leurs contenus sont visibles sur le web a beaucoup évolué ces dernières années. On peut par exemple citer l’importance pris par le trafic Discover dont certains médias sont désormais très dépendants. Rédiger un titre pour augmenter ses chances de performer sur Discover ne répond pas aux mêmes règles que pour être bien référencé sur Google Actualités ou dans les pages de résultats de Google.

Mon rôle est donc aussi de donner un maximum de clés aux rédactions avec lesquelles je travaille pour qu’elles comprennent où leurs articles peuvent être visibles et quelles sont les règles du jeu de chacun de ces « espaces de visibilité » potentiels.

Quels sont les principaux défis que tu dois relever avec tes clients médias ?

Là encore, c’est très varié. Mais j’ai envie de mettre l’accent sur deux d’entres eux :

  • l’évangélisation du SEO auprès des équipes, et surtout auprès des journalistes. Pour ces derniers, il existe souvent un réflexe d’auto défense qui consiste à ne pas vouloir « travailler pour Google ». Et il faut entendre leurs craintes, les rassurer et arriver à placer le curseur de l’optimisation SEO au bon endroit. Notamment en fonction de la place du SEO dans la stratégie globale, de la culture du média ainsi que celle du journaliste en personne. 
  • la mise à disposition de ressources. Parfois, certains clients ne mesurent pas à quel point le SEO est une discipline à 360° qui va venir mettre son nez dans les affaires de presque tous les métiers. Il est donc primordial dès le départ de faire preuve de pédagogie et de bien leur expliquer ce qu’est le SEO, ce sur quoi on va devoir agir pour avoir de l’impact et donc les ressources internes qui vont sans aucun doute, à un moment donnée, devoir être mobilisées.

Est-ce que tu as 2 ou 3 tips pour ceux qui nous lisent ?

Pour revenir à ce que j’expliquais précédemment sur l’évangélisation du SEO au sein des rédactions, je donnerai le conseil suivant : il vaut mieux demander peu et que ce soit bien fait plutôt que de demander trop au risque que rien ne soit fait, par rejet ou par manque de temps. Une fois que les premières consignes SEO sont comprises, appliquées et qu’on est en mesure de démontrer les résultats, les journalistes sont beaucoup plus réceptifs et il sera alors beaucoup plus facile d’en demander un peu plus.

Aussi, je constate souvent qu’au sein des directions médias, on ne voit parfois le SEO que comme un apporteur de pages vues, uniquement là pour satisfaire la régie pub et livrer des impressions. Pourtant, si on le décide, on peut tout à fait mettre en place une stratégie SEO pour toucher une audience très qualifiée, sensible à une thématique précise et à un univers sémantique clairement identifié. Et ainsi être perçu comme expert par une audience cible qu’on pourra ensuite convertir plus facilement en membres ou en abonnés. Il est donc dommage de se fermer des portes avec une vision trop réductrice du SEO. Trafic SEO ne rime pas forcément uniquement avec quantité. Il peut aussi rimer avec ciblage qualifié et trafic de qualité. En fait, le SEO est un outil qui peut être très puissant au service de plein d’objectifs différents.

Enfin, dernier conseil si vous envisagez de travailler le SEO de votre média : soyez patient. Car mis à part quelques « Quick wins », la plupart des optimisations SEO que vous allez réaliser nécessiteront du temps pour produire leurs effets. Les résultats ne se voient pas du jour au lendemain et ne sont pas toujours spectaculaires. Il faut donc une vision long terme et garder le cap.

Est-ce que le métier de consultant SEO a évolué ces dernières années ? Ton métier change t’il au gré des MAJ Google? Et tes recos aussi ?

Mon métier a beaucoup changé et ce sera encore le cas dans les mois et les années à venir, mais pas vraiment au gré des mises à jour de l’algorithme de Google. J’essaie d’avoir une vision long terme de ce qu’un éditeur doit faire pour être performant sur les moteurs de recherche et la vision de Google est assez claire depuis quelques années maintenant : produire des contenus de qualité, sur un site performant avec une navigation agréable pour l’utilisateur.

Par contre, il est vrai que l’algorithme est devenu extrêmement complet et complexe. Les critères pris en compte par celui-ci sont très nombreux et le SEO est donc devenu une discipline encore plus « 360° » qu’avant. Pour bien faire, il faut intervenir sur la technique, sur l’éditorial, sur le design, les réseaux sociaux, l’expérience utilisateur mais aussi la publicité ou même les relations presse. Ça rend le métier passionnant et ça nous oblige à collaborer avec plein d’autres métiers, à apprendre d’eux, à comprendre leurs problématiques et à trouver une façon d’avancer ensemble.

Ensuite, si mon métier change beaucoup, et très vite, c’est d’abord parce que le « produit Google » change beaucoup. Les pages de résultats évoluent régulièrement avec de nouvelles fonctionnalités et de nouveaux blocs. La nature même des moteurs de recherche a changé, en devenant depuis quelques années, surtout des moteurs de suggestion, avec Discover notamment. Et l’arrivée de l’IA et des chatbots comme ChatGPT va encore complètement modifier les règles du jeu.

Evidemment, l’autre facteur qui fait que l’on ne s’ennuie jamais, est le fait d’évoluer dans un métier du web. La technologie évolue très vite et il faut sans cesse réfléchir à la façon dont ces évolutions peuvent permettre d’améliorer la performance des sites sur lesquels on travaille mais aussi faciliter ou enrichir le travail des rédactions et la qualité ou l’originalité des contenus.

Et enfin, travailler dans un secteur aussi riche, mouvant et concurrentiel que celui des médias nécessite également de se réinventer en permanence en prenant en compte les nouveaux acteurs, des nouveaux modèles et des nouvelles façons de consommer l’info de la part des internautes.

Quelles sont les bonnes pratiques d’organisation pour, en tant que média, s’améliorer en continu ?

Pour être performant, il faut surtout une excellente collaboration entre le SEO et les différentes équipes. Car le SEO est finalement l’affaire de tous ou presque. On aura beaucoup de mal à être performant si on n’arrive pas à impliquer au moins les journalistes, la tech et le marketing. Il faut donc aussi s’assurer qu’on a les ressources nécessaires pour appliquer les recommandations. Et avoir bien conscience que le responsable ou consultant SEO ne peut pas agir seul dans son coin.

Je suis aussi persuadé que pour réussir à vraiment embarquer la rédaction et faire comprendre aux journalistes l’intérêt d’appliquer les bonnes pratiques SEO, il est primordial d’être en lien direct avec eux ou avec les rédacteurs en chef. C’est comme ça qu’on peut, au quotidien ou au moins de façon hebdomadaire, leur apporter un feedback très concret sur les échecs, les succès, les erreurs à éviter et les bonnes pratiques à reproduire. Et c’est ce qui fait qu’ils commencent à s’y intéresser, à comprendre les bonnes pratiques et à se les approprier.

Je recommande également le plus possible la mise en place d’outils et d’indicateurs de suivi de la performance des articles au sein des rédactions, accessibles à tous les journalistes. Il est primordial que ces derniers puissent suivre les résultats de leur travail pour que naisse chez eux le désir de comprendre ce qui fonctionne, pourquoi et comment s’en inspirer.

Est-ce que le SEO c’est l’affaire des journalistes, des Tech ou du marketing ?

Des 3, et même au-delà !


La newsletter The Audiencers : de professionnels, à professionnels

Envoyée toutes les 2 semaines, avec dedans des conseils concrets et applicables, des voix d’experts et des benchmarks inspirants, pour vous aider à mieux engager, convertir et fidéliser vos audiences.